Patricia est une femme de 48 ans mariée depuis 22 ans. Elle est maman de deux enfants, un garçon et une fille tous deux d’une vingtaine d’années. En février 2014, sa vie va prendre un nouveau tournant à la suite de son diagnostic. Patricia apprend qu’elle est atteinte d’une sclérose en plaques. Après l’écriture nécessaire d’un livre, entre conseils et prises de conscience, découvrez son témoignage poignant.
- Présentez-vous :
Je m’appelle Patricia, j’ai 48 ans, je suis mariée depuis 22 ans et maman de deux enfants, un fils de 27 ans et une fille 20 ans.
- Comment avez-vous été diagnostiquée ?
J’ai été diagnostiquée en février 2014 suite à une année 2013 compliquée et douloureuse. Mon activité de coiffeuse et prothésiste ongulaire est devenue soudainement très compliqué à gérer. J’avais alors de grosses douleurs que je mettais sur le compte du poids des valises, élément indissociable de mon métier, que je portais quotidiennement. J’étais très fatiguée, j’associais ceci au fait d’être une maman méticuleuse, je veux que tout soit impeccablement tenu. S’ajoutent à cela une baisse de la vue et une difficulté à mémoriser certaines choses que je maîtrisais pourtant parfaitement. Je suis d’un naturel aguerri face à la douleur. Je voulais continuer à tout gérer pour rendre la vie la plus agréable possible à ma famille.
- Qu’est-ce que vous avez ressenti ?
Le diagnostic tombe, j’ai vécu cela comme un véritable choc, je me suis laissé aller. J’ai été confrontée pendant un moment à un vide amical autour de moi. J’ai dû cesser toutes activités professionnelles et me suis retrouvée en invalidité. Tout ceci est très compliqué à gérer, c’est dévastateur lorsque l’on est une personne particulièrement active qui refuse cette réalité.
- Comment vous sentez-vous aujourd’hui ?
J’ai mis du temps, peu apparemment comparé à certains, mais un jour, je me suis retrouvée face au miroir et le reflet m’a choqué. Cette femme que j’avais en face : insipide, triste et désemparée, ne me ressemblait pas du tout. Je ne pouvais pas me résoudre à rester ce fantôme que j’avais devant moi et qui ne traduisait pas la femme que j’étais auparavant. J’ai tout doucement repris du poil de la bête, environ un an et demi après le diagnostic en me remettant en question. J’ai dû faire le deuil de la personne que j’étais pour pouvoir me reconstruire et survivre à tout cela.
Je me suis alors plongée dans l’écriture de mon livre qui a été un exutoire et très révélateur. “Plus jamais moi, à perpétuité avec la sclérose en plaques” est sorti aux éditions Kawa et marche très bien, il aide beaucoup de personnes.
- Êtes-vous une femme engagée ?
Je me suis tournée vers les autres en créant l’association “acSEPte“, association que j’ai voulue de proximité avec une action immédiate. Cette association a pour but d’améliorer le quotidien des personnes en souffrance, atteintes de différentes pathologies, peu comprises et de les aider. Nous proposons des solutions pour mieux-vivre au quotidien grâce aux médecines parallèles. Si elles ne sont pas prises en charges habituellement, avec l’acSEPte, elles sont mises à disposition gratuitement avec l’aide d’intervenants professionnels bénévoles. Le but est de se détendre, proposer des sorties, des réunions et divers ateliers créatifs ou esthétiques. Certaines marques de cosmétiques que je démarche, sensibilisées par les actions entreprises par l’association, m’envoient des produits de soin que nous offrons aux adhérents. Nous avons encore de nombreux projets, notamment avec Anne-Cécile Ratsimbason, dont We are Patients a publié des articles il y a peu, qui est une super amie.
Me tourner vers les autres me fait moins penser à moi, et beaucoup ont besoin de ce soutien. Je m’efforce de mieux faire connaître la SEP et je me rends aussi dans les écoles afin de sensibiliser les enfants au handicap.
- Qu’est-ce que la maladie a changé pour vous ?
Aujourd’hui, je ne peux plus travailler, je ne vois pratiquement que d’un œil, je ne peux plus me déplacer seule, mais je marche quand même avec une canne et parfois, j’utilise mon fauteuil pour me soulager. Même si je vis cette pathologie avec des douleurs nuits et jours, je souris quand même, de façon différente, mais je souris. Je suis une autre. J’ai dû réadapter mon quotidien ainsi que tous mes gestes, mais je fais les choses par moi-même. La vie devient trop programmée à mon goût, exit les imprévus et les joies de l’inattendu !
Je n’ai malheureusement droit à aucun traitement, même pas pour la SEP, car je suis poly-allergique et je ne supporte aucun médicament. J’ai fait cinq œdèmes de Quincke à cause de certains médicaments. Je fais très attention aujourd’hui, même si peu de choses me soulagent, je fais avec et je me dis qu’il y a pire que moi dans la vie.
- Votre hygiène de vie a-t-elle changé ?
Mon hygiène de vie a changé, je fais plus attention à mon alimentation, enfin mon mari prend soin de cela. Je pratique le yoga dès que cela est possible. Ma façon de penser est différente, j’ai remis les vraies priorités à l’ordre du jour. La seule richesse que l’on a c’est la santé, lorsqu’on ne l’a plus on s’aperçoit que rien n’est acquis, que la vie peut basculer en quelques secondes sans que l’on y puisse grand-chose.
Je profite de ce que la vie me donne encore, je préfère la qualité d’un moment entourée des miens plutôt que la quantité. Beaucoup de choses deviennent compliquées avec la SEP, mais j’ai trouvé d’autres moyens de m’épanouir.
Je suis plus calme, je prends le temps de faire les choses, de toute façon, je n’ai pas le choix donc autant accepter ! Je m’aperçois, en fin de compte, que j’arrive tout de même faire de nombreuses choses par moi-même, c’est une grande source de satisfaction.
Me sentir utile pour les autres me fait dire que j’ai encore beaucoup de choses à réaliser et si je peux mettre mon petit grain de sable, aussi minuscule soit-il pour faire changer un peu les regards et les mentalités, eh bien, je continuerais de m’y atteler.
- La maladie a-t-elle renforcé votre relation avec vos proches ?
Je ne m’entoure que de personnes vraies, certaines sont sorties de ma vie et d’autres y sont entrées. Je ne les aurais peut-être jamais croisées sur mon chemin si je n’avais pas été malade. Je rencontre des gens formidables et remplis d’empathie, comme moi, cela fait du bien. Je suis plus proche que jamais de mon mari qui est adorable, sans lui, je ne pourrais pas faire le quart de ce que je fais. Mes enfants sont eux aussi d’un indéfectible soutien.
- Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui vient d’être diagnostiqué de la même pathologie que vous ?
Chacun est différent et réagit à sa façon, essayer de ne pas s’isoler est très important. N’hésitez pas à trouver de l’aide auprès d’un professionnel ou autre si besoin. N’ayez pas peur de réadapter vos gestes pour vous faciliter le quotidien et surtout soyez très à l’écoute de votre corps.
- Quel message souhaitez-vous délivrer à la communauté de We are Patients ?
“La vie est belle, même si…”