INTERVIEW. Amandine a deux ans quand on lui détecte ses premières dépigmentations. Aujourd’hui âgé de 26 ans, la jeune alsacienne aide les personnes atteintes de vitiligo à s’accepter grâce à la photographie.
- Présentez-vous ?
Je m’appelle Amandine Fritsch, j’ai 26 ans, je suis chargée de communication et j’ai le vitiligo depuis l’âge de deux ans. Aujourd’hui, je tente d’aider les personnes qui souffrent de cette maladie. Je leur véhicule un message positif, j’apporte de la force et du courage pour mieux qu’elles s’acceptent.
- Comment avez-vous été diagnostiquée ?
J’ai été diagnostiquée grâce à l’association française du vitiligo et plus particulièrement Christine qui est bénévole et qui habite aussi en Alsace. Ma maman lui a alors montré ma dépigmentation quand j’avais deux ans et Christine lui a dit, que c’était du vitiligo, mais qu’il fallait toute même demander la confirmation à un spécialiste. Mon grand-père ayant du vitiligo, on se doutait que c’était ça et ça bien été confirmé ensuite par le dermatologue.
- Qu’avez-vous ressenti ?
Quand on est enfant, on ne ressent pas le regard des autres. Là, où j’ai commencé à le ressentir, c’est quand une fois, je devais peut-être avoir 6 ou 7 ans, j’étais dans un parc, une dame a dit à ma mère « vous devriez avoir honte de maquiller votre fille à son âge » parce que j’ai des zones dépigmentées au niveau des paupières. Quand j’ai entendu ça, je savais que j’avais une « maladie » et j’ai commencé à me dire que ce n’était pas gentil, car ma maman n’y pouvait rien.
Le plus compliqué reste pour moi la période collège/lycée. J’ai eu des regards insistants, des gens qui se retournent lors de mon passage. Mais au final, j’ai eu très peu de réflexions, car c’était plutôt moi qui me mettais des barrières. Je me sentais très mal dans ma peau, je me sentais différente, je m’interdisais plein de choses comme sortir avec mes amis. Je n’allais pas aux cours de piscine et en été, je ne portais que des vêtements longs. Le problème au final fut plus le regard que je portais sur mon corps.
- Comment vous sentez-vous aujourd’hui ?
Je me sens très bien, j’ai fait un gros travail sur moi ça a vraiment mis des années et de toute façon, toute ma vie, je continuerai à m’améliorer et à me sentir encore mieux. Je suis bien dans ma peau, mais je ne suis pas à 100 % tous les jours. Si un jour, je suis plus fatiguée par exemple ou à fleur de peau, certains regards pourront plus m’impacter. A l’inverse, les autres jours tout ira bien.
- Qu’est que la maladie a changé pour vous ?
Le fait d’avoir le vitiligo m’a rapproché des gens. Je consacre beaucoup de mon temps aux personnes qui ont du vitiligo, je les écoute, je les accompagne. D’un point de vue humain, j’ai des liens assez fort avec certaines personnes qui au fil du temps deviennent des amis pour certains.
Ensuite, j’ai appris à vivre avec une différence. Je sais à quel point les regards ou les questions peuvent être parfois difficiles, ce qui me rend d’autant plus tolérante face à la différence. Quand quelqu’un a une différence qu’importe ce qu’elle ait, je vais faire attention à ne pas regarder cette personne, car je sais qu’un simple regard si on est mal dans sa peau peut blesser.
- Êtes-vous engagé ?
J’ai été engagée, j’ai été membre du comité de l’association française du vitiligo pendant plusieurs années. Aujourd’hui je ne suis plus que adhérente, j’apporte notamment mon aide lors des journées mondiales du vitiligo. Je consacre du temps à cette cause qui m’est chère, je développe notamment des projets artistiques.
Je fais énormément de projets autour du vitiligo, j’ai aussi un travail et tout ça me prend du temps. Après, je continue toujours à aider l’association, chaque année au mois de juin, il y a la journée mondiale du vitiligo. Là, je les aide dans tout ce qui est la relation-presse, et je vais organiser l’événement en Alsace.
- Parlez-nous de vos projets ?
La photographie a été l’élément déclencheur qui m’a permis d’avoir un autre regard sur mon corps. J’en fais depuis l’âge de 18 ans, je la pratique seule et parfois en duo. J’organise parfois des rencontres sous la forme de shooting-photo pour aider les personnes à s’accepter. J’ai pu voir de réels changements entre leur arrivée tête baissée, stressée et emmitouflée dans un pull et leur départ en t-shirt avec un énorme sourire et tout simplement heureux. Un autre beau projet, c’est l’exposition que j’ai montée au lycée Jean Mermoz pour parler de la différence et du vitiligo. C’est un projet qui m’a tenu à cœur parce que les années lycée ont été les plus compliquées pour moi par rapport à mon mal-être. Finalement ça a été une belle revanche que de faire une exposition dans ce même lieu.
Un autre beau projet, c’est l’exposition que j’ai montée au lycée Jean Mermoz pour parler de la différence et du vitiligo. C’est un projet qui m’a tenu à coeur parce que les années lycée ont été les plus compliquées pour moi par rapport à mon mal-être et finalement ça a été une belle revanche que de faire une exposition dans ce même endroit.
- La maladie a-t-elle renforcé vos liens avec vos proches ?
Je pense que ça a surtout renforcé les liens avec des personnes qui ont du vitiligo. J’ai créé des amitiés très fortes, notamment avec une personne qui habite à plus de 1000 km de chez moi et avec qui on s’écrit ou s’appelle tous les jours. Le vitiligo a créé de très belles relations amicales, ainsi que professionnelles.
Je pense que le fait de s’accepter et d’être plus ouverte à parler de mon vitiligo a renforcé le lien avec grand-père qui en a également. On n’en parlait pas du tout alors qu’on avait cette maladie en commun. Aujourd’hui, on discute naturellement, il peut m’arriver d’en faire de l’humour, disons que ce n’est plus un sujet tabou.
- Quels conseils donneriez-vous à un patient ?
J’ai décidé de ne pas courir après une solution qui on ne sait pas si elle sera efficace. J’ai simplement décidé d’accepter ce que la vie m’a donné. JJe me suis acceptée telle que je suis et telle que j’ai été faite en me disant que si j’ai du vitiligo, ce n’est peut-être pas pour rien. Finalement cette maladie qui au départ me semblait être une faiblesse est une réelle force. Ma peau m’encourage à faire de nouveaux projets.
- Un message à la communauté WAP ?
Acceptez-vous tels que vous êtes, aimez vous en tant que personne tout entière et profitez des bonnes choses qui viendront vers vous.