Lorenza est une jeune italienne de 19 ans qui a grandi à Paris. Elle a été diagnostiquée bordeline, aussi appelé trouble de la personnalité limite. Aujourd’hui, elle est très entourée par sa famille. Son rêve, participer aux jeux paralympiques d’équitation.
- Présentez-vous :
Je m’appelle Lorenza et j’ai 19 ans. J’ai grandi en Italie, je suis arrivée à Paris à l’âge de dix ans, et c’est dans cette ville que j’ai passé mes années collège et lycée. Je suis devenue anorexique à l’âge de 11 ans et boulimique à l’âge de 16 ans. Les médecins m’ont aussi qualifiée de dépressive atypique, mais après plusieurs hospitalisations, ils ont convenu que ces maladies n’étaient en fait que des symptômes d’un trouble borderline.
- Comment avez-vous été diagnostiquée ?
Au début, on m’a diagnostiqué anorexique à tendance boulimique suite à une très grosse perte de poids avec un IMC qualifié d’état de famine (en dessous de 15). C’est avec cette perte de poids que j’ai commencé à faire des crises de boulimie vomitive. En juillet 2017, suite à une rupture amoureuse très compliquée, j’ai fait une tentative de suicide, et j’ai été hospitalisée pendant deux mois dans un hôpital psychiatrique. C’est pendant cette hospitalisation que mon diagnostic a évolué, les médecins ont considéré que l’anorexie, la boulimie, les épisodes dépressifs et la tentative de suicide étaient en fait des symptômes d’un trouble borderline, appelé aussi trouble de la personnalité limite. Ce qui a appuyé et aidé ce diagnostic, c’était ma crainte permanente d’être abandonnée, et la façon que j’avais d’éviter les situations d’abandon par tous les moyens, comme par exemple avec mon petit copain de l’époque. Mon humeur extrêmement instable peut varier très rapidement, ma sensibilité est très élevée aux événements de la vie qui peuvent sembler anodins.
- Qu’est-ce que vous avez ressenti ?
Je n’étais plus dans un flou permanent. C’est comme si j’avais eu plein de pièces d’un puzzle que je n’arrivais pas à constituer. J’ai ressenti une sorte de soulagement, j’étais contente de pouvoir enfin mettre des mots sur tout ce qui m’arrivait. Là, j’avais enfin pu assembler les morceaux et comprendre l’ensemble. Certes, j’ai été aussi troublée, car je savais que ce n’était pas une chose que l’on pouvait vraiment soigner, mais je me suis dit que, au moins, des thérapies adéquates pourraient être enfin mises en place.
- Qu’est-ce que la maladie a changé pour vous ?
La maladie a changé toute ma vie. Ma relation avec ma famille a changé, je suis beaucoup plus proche d’eux maintenant. La maladie a aussi changé mon corps et ma vie de tous les jours : d’abord par l’anorexie, et aussi car je suis devenue handicapée suite à ma tentative de suicide. Je ne peux me déplacer qu’en fauteuil roulant, je ne peux pas me laver et m’habiller seule. J’espère de tout mon cœur pouvoir refaire quelques pas un jour.
- Êtes-vous engagée ?
Je ne l’étais pas avant, j’étais beaucoup trop renfermée sur moi-même. Maintenant, je commence à l’être. Je suis très touchée par la cause animale, je suis végétarienne et souhaite devenir végétalienne.
La place des personnes handicapées, tout particulièrement les personnes à mobilité réduite, est une cause qui est devenue très importante à mes yeux. C’est une question qui me tient très à cœur, car la société est vraiment inadaptée pour nous. J’habite Paris, c’est une capitale de renommée mondiale et pourtant, elle est extrêmement en retard sur la question. Seulement une ligne de métro est adaptée, les places de parking réservées ne sont pas faciles à trouver et les trottoirs sont souvent très compliqués à pratiquer quand on est en fauteuil roulant. Puis il y a aussi les logements. Personnellement, je ne vais pas pouvoir rentrer chez moi à ma sortie du centre de rééducation car j’habite au 4ème étage sans ascenseur, et j’ai l’impression que trouver un nouvel appartement ne va pas être évident. Toutes ces questions sont au centre de ma vie à présent.
- La maladie a-t-elle renforcé votre relation avec vos proches ?
Énormément. Avec ma mère, on a toujours été très proches. Nous le sommes encore plus désormais. Elle fait tout son possible pour venir me voir souvent et me faire plaisir, malgré le fait que je sois loin et qu’elle ait un travail très prenant et peu de ressources. La maladie m’a beaucoup rapproché de mon père. Mes parents sont divorcés, on s’était peu vus ces dernières années, mais on s’est beaucoup rapprochés, mon père essaye de comprendre au maximum et ne porte aucun jugement. Mes troubles m’ont permis de le voir plus souvent, et d’avoir une relation chaleureuse avec lui. J’ai la chance d’avoir une famille qui me soutient à 200%, ce qui est une aide précieuse.
- Quels conseils donneriez-vous à un patient ?
À tous les patients, je conseille de garder le moral malgré la maladie. C’est important de toujours trouver du bon dans la vie de tous les jours, même dans des petites choses, pour pouvoir avancer. Je conseille aussi de bien s’entourer et de prendre le temps de s’occuper de soi, et de faire des activités qu’on aime, de prendre soin de son corps et de son esprit, car les deux sont complémentaires.
Accrochez-vous à vos passions, mon rêve à moi serait d’aller aux jeux paralympiques d’équitation et ça me motive plus que tout.
Aux personnes qui ont des troubles psys, comme l’anorexie ou le trouble borderline par exemple, si vous avez peur de consulter, essayez vraiment de le faire. C’est fondamental d’avoir un suivi médical et psychologique pour pouvoir s’en sortir. Il ne faut pas avoir peur d’être considéré comme un « fou », personne ne l’est, on est juste malades.
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