INTERVIEW. Cloé : « Il faut toujours continuer de pratiquer son sport ou son hobby »

Cloé souffre de la maladie de Parkinson depuis plusieurs années. Sa passion, c’est l’équitation. Elle en fait d’ailleurs son métier. Avec sa maladie, Cloé se spécialise dans le para dressage. Son prochain objectif : participer aux jeux paralympiques de Tokyo en 2020. 

  • Présentez vous

Je m’appelle Cloé, j’ai 33 ans et je suis maman d’une trentaine d’enfants poilus et à quatre jambes !

  • Parlez-nous de votre passion

Je suis une mordue d’équitation mais avant tout une férue des chevaux et j’ai entrainé mes parents dans cette passion. J’ai commencé l’équitation à l’âge de 8 ans et un an plus tard je m’achetais mon premier poney Quitch avec mes petites économies. J’ai pratiqué plusieurs disciplines équestres allant même jusqu’au Canada pour passer mon diplôme d’instructeur en équitation Western car il n’y avait à l’époque pas de diplôme équivalent en France.

  • Comment avez-vous été diagnostiquée ?

Je crois que ma première expression : « quel parcours du combattant ! » Au final c’est le « nomadisme médical » qui m’a sauvé car j’ai fini par atterrir en 2009 chez un super neurologue qui m’a écouté, correctement examiner et repris mon dossier en main. Il m’a fait refaire une scintigraphie cérébrale au Dat Scan déjà anormale à deux reprises mais dont aucun médecin n’avaient correctement interpréter ou tenu compte des résultats et c’est ce qui a permis de poser le diagnostic de syndrome parkinsonien. J’ai rapidement débuté un traitement à base de Lévodopa (Dopamine) et dès le premier jour cela m’a changé radicalement la vie.

  • Vous étiez jeune, qu’est-ce-que vous avez ressenti ?

L’annonce du diagnostic a été faite par un interne lors d’une hospitalisation : « Vous avez un parkinson et l’avenir ne sera pas rose mais vous allez enfin avoir un suivi médical correct ». Bien sûr à cette époque je pensais que cette pathologie ne concernait que les personnes âgées dont l’unique symptôme était d’avoir la « tremblote » et c’est toujours l’image que la grande majorité des français se font de cette pathologie.

Je suis allée à une réunion locale de France Parkinson, ce qui ne m’a pas vraiment rassurée vu l’état des participants et les témoignages des aidants. Il y a quand même eu plusieurs mois de déni de la maladie ou j’ai continué à prendre mon traitement anti parkinsonien et du coup tout allait vraiment bien (c’est l’effet Lune de Miel parait-il…) mais malheureusement ça n’allait pas durer.

  • Comment gérez-vous la maladie au quotidien ?

Je n’ai pas de tremblements mais j’ai des raideurs musculaires, de la lenteur, une dysautonomie assez importante, des problèmes d’équilibre, de coordination, de mémoire, de la spasticité et des soucis respiratoires entrainant beaucoup de fatigue au quotidien. C’est parfois difficile de composer avec tout ça mais je m’en sors pas trop mal. L’équitation et la kiné sont les meilleures des rééducations dans mon cas, d’ailleurs à cheval je suis comme transcendée ! À ce jour, je prends des doses « de cheval » de Lévodopa toute les 90 minutes même la nuit pour éviter les blocages ou phénomène OFF particulièrement violents chez moi. J’ai appris à me prendre en charge avec ma pathologie, cela m’oblige à avoir constamment mon traitement sur moi, c’est devenu une habitude mais je sais que dans mon cas c’est vital.

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  • Para dressage, épreuves handisports, jeux paralympiques, vous aimez la compétition ? Racontez-nous !

En 2009 et 2010 malgré le diagnostic j’ai continué la compétition en équitation Western avec les valides (j’ai été double championne de France en 2009) et lors d’un concours fin 2010 je fais une chute très impressionnante liée en grande partie à mes réflexes ralenti par Parkinson. C’est un coup dur pour moi, c’est le moment où j’ai vraiment pris conscience de la présence de la maladie et que désormais il faudra avoir des objectifs plus en adéquation avec mon état de santé.

Je me renseigne sur internet et je trouve le site de l’association Handi Equi Compet qui parle de para dressage et de para CSO pour les personnes en situation de handicap. Je passe une classification pour savoir si mon handicap me permettra de concourir en équitation handisport et à quel niveau. Je me suis entrainée pour pouvoir intégrer l’équipe de France de Para Dressage, et en février 2014, après un stage de détection, j’ai débuté les compétitions internationales dit CPEDI.

Pour moi, avoir des objectifs de haut niveau c’est un moteur pour me dépasser constamment ! En 2016 j’ai fait tous les CPEDI qualificatifs pour les Paralympiques de Rio mais je n’ai pas fait partie du voyage car mes résultats de la saison étaient trop irréguliers. J’ai maintenant l’objectif de me qualifier pour les Jeux Paralympiques de Tokyo en 2020 avec mon nouveau cheval Don Caruso. Le chemin sera long mais je suis hyper motivée et je me sens très soutenue dans cette démarche ! Vous pourrez suivre mon parcours en likant ma page Facebook : Cloé Mislin cavalière handisport, ou sur mon site internet : www.cloemislin.fr

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  • Parlez-nous de votre association

Depuis 2012 je suis également présidente de l’association Amaé (association pour la médiation animale et l’équithérapie) qui a fait bénéficier plusieurs centaines de personnes en situation de handicap d’activités à visées thérapeutiques et ludiques au contact du cheval. J’ai pu observer sur moi-même depuis longtemps les bienfaits physiques et psychologiques que m’apportaient les chevaux au quotidien pour mieux vivre et mieux gérer ma pathologie et c’est pour cette raison que j’ai voulu en faire bénéficier d’autres personnes. www.amae-asso.fr

  • Qu’est-ce-que la maladie a changé pour vous ?

Ma vision de la vie est radicalement différente car je prends le temps d’apprécier les petits bonheurs quotidiens, c’est vrai que la maladie m’a probablement privé de beaucoup de choses mais elle ma aussi ouvert les yeux sur d’autres possibilités que je n’aurais probablement jamais explorées. Il y a aussi parfois des grands moments de frustrations et de désespoir quand on constate que la maladie grignote du terrain petit à petit et que de plus en plus de choses ne fonctionnent plus comme avant mais je me dis qu’il y a toujours bien pire que moi.

  • Comment est votre relation avec vos proches ?

Elle est très bonne, je me sens très soutenue par mon entourage et je sais que c’est une chance !

  • Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souffre de la même pathologie ?

De toujours continuer à pratiquer son sport ou son hobby quel qu’il soit mais de manière adaptée ! Il faut garder au moins une activité bénévole pour ne pas s’isoler et aider les autres c’est aussi un peu s’aider soi-même. Je reste convaincue que c’est à chaque patient de communiquer sur sa pathologie, de ne plus se cacher, ce n’est que de cette façon que l’on fera changer le regard de la société sur cette maladie. Je trouve juste dommage que nos grosses associations s’occupant du Parkinson n’accordent pas plus la place à des témoignages de jeunes patients engagés sur le plan national comme cela se pratique pour d’autres pathologies.

  • Quel message souhaitez-vous délivrer à la communauté We are Patients ?

De ne jamais baisser les bras et d’apprécier chaque moment de la vie

  • Motivation, courage, où trouvez-vous toute cette force ?

Je puise ma force auprès de mes proches, de mes chevaux, de mes projets équestres sportifs et aussi dans tous les sourires et les progrès des bénéficiaires lors de nos séances d’équithérapie chez Amaé.

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